L’Europe met au pas les distributions intragroupes
Publications d'expert | 24 mars 2016
La neutralité complète des distributions de filiales détenues à 95% dans le cadredu régime de l’intégration fiscale (CGI art. 223 B) était bien connue. Elle était toutefois soumise à une condition : que cette filiale soit française. Ainsi, les distributions en provenance de sociétés établies dans un autre pays de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen ne pouvaient bénéficier au mieux que du régime des sociétés mères et filiales (CGI art. 216), à l’instar de celles effectuées par des filiales françaises hors intégration : elles se voyaient ainsi taxées à l’impôt sur les sociétés chez la société mère à raison d’une quote-part de frais et charges égale à 5% de leur montant.
La Cour de justice de l’Union européenne détenue à plus de 95% qui, si elle avait été établie en France, aurait objectivement été éligible au régime de l’intégration fiscale (CJUE, 2 septembre 2015, aff. C-386/14, Groupe Steria SCA). Il a ainsi été jufgé dans ce cas particulier que l’application de la quote-part de frais et charges de 5% portait atteinte de manière injustifiée à la liberté d’établissement. Cette solution, très attendue, pouvait dès lors ouvrir la voie à de nombreuses demandes de remboursement pour les années non prescrites, contentieux déjà évalué à 340 millions d’euros fin 2015.
Certains spécialistes anticipaient une suppression pure et simple par le gouvernement de la neutralisation des distributions internes à un groupe d’intrégration fiscale, disposition d’ailleurs pointée du doigt par la Cour des compttes en 2011 au regard de son coût annuel – 1.6 milliards d’euros. Il eût effectivement été plus favorable d’étendre la neutralité fiscale des distributions intragroupe aux filiales européennes détenues à 95%, mais la situation des finances publiques laissait craindre que cette jurisprudence communautaire ne soit finalement perçue comme un coup de pouce budgétaire inespéré par Bercy … A moins qu’une telle extension puisse être compensée mais les solutions envisagées effrayaient le patronat.
En définitive, et s’il a bien été mis fin à la neutralisation des remontées de dividendes intragroupes, celles perçues de filiales françaises fiscalement intégrées continuent à bénéficier de règles dérogatoires au droit commun, étant désormais soumises à la taxation d’une quote-part de frais et charges réduite à 1% de leur montant – contre 5% dans le cadre du régime des sociétés mères et filiales. En parallèle, et suivant les prescriptions de la CJUE, les distributions de filiales européennes détenues directement ou indirectement à 95% bénéficient elles aussi de cette nouvelle quote-part à taux réduit de 1%. Une issue qui tend finalement à satisfaire tout le monde, qu’il s’agisse des groupes à vocation européenne ou des entreprises franco-françaises n’ayant pas opté pour l’intégration fiscale.
En outre, il convient de relever que contrairement à l’ancien dispositif, qui réservait la neutralisation de la quote-part de frais et charges aux distributions versées par une société membre du groupe depuis plus d’un expertise, le taux de 1% concerne dorénavant les dividendes mis en paiement au cours du premier exercice de constitution du groupe. l’ensemble de ces modifications s’appliquent aux distributions effectuées au cours des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016.
En pratique, la société mère intégrante devra donc êter en mesure de justifier l’assujetissement à un impôt équivalent à l’impôt sur les sociétés des filiales étrangères distributrices, de leur niveau de détention et du fait que leur date d’ouverture coïncide avec celle des sociétés membres du groupe fiscal. Des précisions sont attendues s’agissant de la délivrance de l’accord de la filiale, condition classique d’appartenance au périmètre d’intégration. A noter également que la quote-part de frais et charges de 1% sera appliquée pour l’établissement du résultat individuel de la société membre qui a perçu les dividendes , et non pour l’établissement du résultat d’ensemble.
Précisons encore, à toutes fins utiles, que les sociétés concernées pourront, le cas échéant, contester jusqu’au 31 décembre 2016 l’impôt sur les sociétés payé indûment au titre de l’exercice clos en 2014 sur le fondement de l’arrêt Steria.